Courrier des lecteurs
Articles parus dans les numéros "spécial été 2009" et 105 (septembre 2009) de JeuxVidéo Magazine
 



Les jeux vidéo ont-ils perdu leur âme ?
J'écris pour réagir au Forum n°104, où des lecteurs se plaignaient du prix des jeux. Je sais, c'est la crise et je râle déjà quand j'achète un jeu Wii à 50 euros ou DS à 40 euros, donc je comprends qu'on puisse en avoir marre de payer 70 euros (cependant, les jeux PS3 et Xbox 360 baissent rapidement ou ressortent en gamme budget. Nintendo, lui, a du mal à baisser ses prix, et c'est très énervant). Néanmoins, je voudrais rappeler que du temps de la NES, le prix des jeux était de 550 francs (presque 84 euros) ! Alors 70 euros ce n'est pas si exorbitant, surtout que les budgets sont bien plus élevés aujourd'hui qu'à cette époque.

Par ailleurs, je rappelle que l'on n'est pas obligé de jouer tout de suite à toutes les nouveautés de qualité, et que souvent on n'en a pas le temps de toute façon. Quant à la durée de vie, on se plaint de payer 70 euros pour 10h, mais je préfère les jeux condensés à ceux qui s'étirent inutilement sur 50h (par exemple, certains RPG traînent en longueur).

Les jeux d'antan duraient en moyenne moins longtemps, mais du fait de leur difficulté, de leurs passages secrets et surtout de leur potentiel de rejouabilité, on y consacrait des mois entiers. Le vrai problème ne réside donc pas dans la brièveté des jeux, mais dans leur manque de profondeur. Pourquoi ne pas faire comme avant : proposer plusieurs niveaux de difficulté, pousser le joueur à rejouer, insérer des bonus utiles à débloquer (armes inédites, nouveaux personnages impliquant un autre gameplay...) ? Pour ces raisons, je délaisse les jeux en ce moment : ai-je perdu mon âme, ou les jeux ont-ils perdu la leur ?
- Badland -


E
h bien, plusieurs studios de développement ont déjà appliqué vos suggestions. Les cartes multi-joueurs supplémentaires pour Call of Duty 4 ou Halo 3, le scénario additionnel pour GTA IV (The Lost and Damned sur Xbox 360), les nouvelles sous-quêtes pour Fable II (L'Île de Knothole) ou Mass Effect (Turbulences à 900 000 pieds) prolongent parfois considérablement l'espérance de vie de ces jeux, pour un prix assez raisonnable. Quant aux nouveaux modes, véhicules ou ajustements de gameplay de Burnout Paradise, ils sont carrément gratuits !

Toutefois, à certains égards, les jeux sont effectivement moins mystérieux et moins riches qu'auparavant. Qui, aujourd'hui, oserait encore créer un monde à double fond comme celui de Super Mario World, où les niveaux les mieux cachés dissimulent eux-mêmes l'entrée d'une seconde zone secrète ? Et dans quels FPS récents les missions changent-elles réellement en fonction du niveau de difficulté, comme c'était le cas dans GoldenEye ou Perfect Dark ?



Etudier le jeu vidéo à la fac, c'est possible ?
Votre article sur les écoles de jeu vidéo a dû démoraliser plus d'un de vos jeunes lecteurs, à cause des coûts d'inscription clairement exorbitants des écoles indiquées. Il existe pourtant d'autres voies, moins chères, qui mènent à l'industrie du jeu. Je pense par exemple à l'université qui permet, à bas prix, de former des informaticiens jusqu'à bac + 5. Certaines spécialités de Master 2 (5e année) sont très convoitées par le monde du jeu vidéo : Réseau, Intelligence artificielle, Image.... Ces formations ouvrent des portes vers le jeu vidéo, et ne ferment pas les autres. Voilà, c'était un petit message rassurant pour dire que s'endetter n'est pas indispensable pour travailler dans le jeu.
- Fman -

Vous faites bien d'évoquer ces formations universitaires en programmation, mais n'oublions pas celles qui sont conçues pour préparer spécifiquement aux métiers du jeu. Après bac + 2, l'IUT de Bobigny ouvre ainsi en 2009 une Licence Professionnelle "Concepteur en niveaux et performances de jeux vidéo et numériques". Après bac + 3, l'ENJMIN (Ecole Nationale des Jeux et Médias Interactifs Numériques) d'Angoulême propose un Master "Jeux vidéo et médias interactifs numériques" doté de plusieurs options : game design, gestion de projet, programmation, infographie, ergonomie et sound design. Quant à l'Institut International du jeu vidéo de Cannes, il dispense un Master "Management des jeux vidéo". Enfin, l'ILOI (Institut de l'Image de l'Océan Indien) de La Réunion offre un Master "Production, game design, infographie 3D".




Duke Nukem Forever, perdu à jamais ?
Je veux revenir sur l'annulation de Duke Nukem Forever. C'est un nom qui a bercé mon enfance, toujours présent dans les calendriers de sorties depuis... 1997 ! Même si cette nouvelle m'attriste (d'autant que le jeu était quasi prêt), je pense comprendre pourquoi il a été annulé : si cet épisode au graphisme vieillissant avait vu le jour, à quoi s'attendait-on ? A un triomphe commercial ? A des tests unanimement positifs ? Je n'y crois pas. Duke Nukem est une bonne licence, mais elle a fait son temps et elle n'a sans doute plus sa place dans la génération actuelle. Je lui dis donc adieu...
- Raphaël -


L'espoir d'un retour de notre héros n'est pas tout à fait tari : certes, le développement de Duke Nukem Forever est interrompu suite au licenciement de l'équipe pour cause de manque de financement. Mais le studio 3D Realms, qui a créé la série et investi plus de 20 millions de dollars dans la production de cet épisode, vit encore (avec un effectif réduit). Il conserve la propriété de la licence et affirme vouloir continuer à cocréer des jeux fondés sur cette dernière. Take-Two, de son côté, possède toujours les droits de publication de Duke Nukem Forever. Et la récente réédition du jeu original sur Xbox Live Arcade a dépassé les 100 000 unités vendues : pas mal pour un retraité !


La Xbox 360, conçue pour durer ?
Sortie en 2005, la Xbox 360 n'est plus toute jeune. Dans les prochaines années, des bons jeux sortiront-ils encore sur cette machine ? Ou sera-t-elle abandonnée comme son aînée, la Xbox, qui n'a vécu que quatre ans, de 2001 à 2005 ?
- Amzil -


N'ayez crainte, la Xbox 360 a encore plusieurs années de prospérité devant elle. Selon Aaron Greenberg, chef de produit chez Microsoft, nous n'aurions même pas dépassé la moitié de l'espérance de vie de l'actuelle génération de consoles... Ce qui signifie que la Xbox 360 pourrait rester en magasins jusque 2013 au minimum !

Bien sûr, Microsoft a tout intérêt à communiquer ce message rassurant aux consommateurs. Mais pour le coup, nous avons toutes les raisons de le croire. Le contexte de crise économique ; les investissements exorbitants réalisés jusqu'à présent sur Xbox 360 par Microsoft et par les éditeurs tiers ; le succès de la machine et du Xbox Live, notamment aux Etats-Unis ; le soutien important de tous les éditeurs, occidentaux comme japonais : rien ne pousse à commercialiser bientôt une nouvelle Xbox. Ni Microsoft ni les éditeurs n'ont intérêt à voir sortir une telle machine, qui obligerait tout le monde à repartir à zéro.

De surcroît, le lancement en 2010 de Project Natal (l'interface révolutionnaire qui détecte avec précision les mouvements et la voix des joueurs en se passant de toute manette) promet de pérenniser la Xbox 360. Microsoft compare même la sortie de Project Natal à celle d'une nouvelle console : un événement de grande ampleur, massivement promu et accompagné d'un nombre considérable de jeux exclusifs. En résumé : vous n'êtes pas prêt de jeter votre XBox 360 (à moins qu'elle ne tombe en panne, ce qui est malheureusement loin d'être exclu...).





ARMA II annulé sur consoles : une bonne nouvelle ?
La nouvelle a fait grincer des dents mais tant mieux : ARMA II ne sortira pas sur consoles ! Comme vous le dites vous-mêmes, dans le n°103 de JVM : des versions consoles auraient été l'occasion pour ARMA de "s'ouvrir à un large public... tout en augmentant l'accessibilité". Eh bien non, non aux jeux à la sauce Wii : abordables, certes, mais dégradant le jeu vidéo ! ARMA est un jeu PC pensé pour des hardcore gamers. C'est une simulation, pas un jeu de guerre quelconque. Bravo à Bohemia Interactive d'avoir su ou dû garder le cap, car ce sont les harcore gamers qui font que le jeu vidéo est ce qu'il est en forçant les studios à travailler correctement.
- Looping -


En effet, un titre aussi ambitieux qu'ARMA II aurait probablement été dénaturé en étant adapté sur consoles. D'ailleurs, on se souvient encore du fiasco de Deus Ex II, qui avait largement appauvri le gameplay de l'original (sorti d'abord sur PC) pour tenter de séduire un public de joueurs console : celui de la Xbox. Toutefois, l'interface d'ARMA II aurait gagné à être plus accessible : les menus absurdes compliquent des actions extrêmement simples à réaliser dans la plupart des jeux (donner des ordres à ses coéquipiers est un calvaire). Les jeux PC sont coutumiers de ces problèmes d'interface : nous nous souvenons encore avec effroi d'Hidden & Dangerous, où il fallait presser une touche précise du clavier pour... monter à une échelle ! Et ne parlons pas de l'intelligence artificielle défaillante et des bugs fréquents qui affligent la plupart des jeux PC "hardcore". ARMA II ne fait pas exception : pour un jeu qui se revendique "réaliste" et un studio censé "travailler correctement", c'est gênant...