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Dream
Theater - Scenes from a memory
Avec cet album
attendu comme le loup blanc, Dream Theater s'est superbement réconcilié
avec ses fans. Suite de l'inextricable Metropolis Part 1 d'Images and
words, Scenes from a memory est un concept-album d'une admirable cohérence,
dont toutes les composantes -musique, effets sonores, paroles, pochette-
se répondent, s'éclairent et se renforcent mutuellement.
Histoire complexe
de réincarnation, de trahison fraternelle et de crime passionnel, Scenes
from a memory reprend des mélodies, des textures et des lyrics de Metropolis
Part 1, et donne une signification concrète aux paroles vagues et abstraites
du morceau de 1992. Le remplacement du claviériste Derek Sherinian par
Jordan Rudess permet le retour des prouesses instrumentales -la fin de
Fatal Tragedy est d'une violence, d'une rapidité et d'une intensité mélodiques
à donner le frisson. Il marque aussi l'arrivée d'une forte influence classique,
particulièrement flagrante dans les arrangements du grandiose Finally
Free, qui conclut puissamment l'album avec son alternance de passages
lumineux et de riffs macabres. Stimulé par l'insolent talent de Jordan
Rudess, John Petrucci revient -sur The dance of eternity notamment- au
style saccadé, tendu et tortueux de Metropolis Part 1, maintes fois copié
par les groupes de prog. John Myung est toujours aussi élégant et surprenant.
Mike Portnoy n'a rien perdu de sa fureur et de sa précision (avec ses
innombrables variations rythmiques sur un même riff, la fin de Finally
Free est saisissante). Et James La Brie chante mieux que jamais, délivrant
une émotion extraordinaire en en faisant souvent très peu (Through my
words).
Album-somme
et plus encore, Scenes from a memory réunit tout ce qui fait la personnalité
d'un groupe aujourd'hui au faîte de sa carrière. Capable de la simplicité
la plus confondante -piano, guitare sèche, voix pleine de retenue et de
délicatesse-, comme de la plus ahurissante virtuosité -murs de guitares
monolithiques, chant épique, ruptures de rythme et de ton incessantes,
constructions audacieuses-, Dream Theater signe un album captivant, foisonnant,
où se télescopent magistralement toutes ses influences -au premier rang
desquelles le jazz. Est-ce le meilleur opus du groupe ? Peut-être, mais
une chose est sûre : Scenes from a memory redonne une confiance d'acier
en Dream Theater.
Radiohead
- Kid A
Après trois
ans d'absence, dont deux passés en studio, Radiohead revient
enfin avec ce Kid A maintes fois repoussé. A la manière du U2 d'Achtung
Baby puis Zooropa, Radiohead n'a ici pas hésité à rompre avec son image
rock. Les guitares se font désormais très discrètes, au profit d'ambiances
plus feutrées, plus électroniques qui rappellent immanquablement le trip-hop
et le jazz. L'élégant et hardi dépouillement du disque
se distingue nettement des morceaux intimidants, broussailleux de OK Computer.
Des mélodies douces-amères de Morning Bell, Motion picture soundtrack
et Kid A, au souffle imparable de How to disappear completely -où s'étirent
de puissantes harmonies de violons-, l'émotion décharnée
de Kid A n'en est que plus juste et pénétrante. Less is
more.
Thyrfing - Urkraft
Avec leur dernier
opus, les hollandais de Thyrfing parviennent à surnager au milieu d'une
scène black métal pourtant fort encombrée. Riffs sinueux, constructions
complexes, guitare sèche et voix claire occasionnelles : Urkraft est un
album racé qui contourne habilement tous les clichés du genre. La forte
influence médiévale qui domine l'ensemble est originale, et relève d'une
démarche salutaire : comme l'avait bien compris un Borknagar, ce n'est
qu'en se montrant perméable à d'autres musiques que le black -et le heavy
métal en général- continuera d'avancer.
Andromeda
- Extension of the wish
Quand, en 1992,
Dream Theater sort son séminal Images and Words, il ne se doute pas que
son morceau Métropolis va devenir la matrice et le mètre-étalon d'un genre
nouveau, le métal progressif. En près de dix minutes révolutionnaires,
fulgurantes, intenses et d'une densité restée inégalée, le groupe établit
toutes les caractéristiques d'une forme de musique à la sophistication
insensée : breaks incessants, mélodies épiques, virtuosité et inventivité
instrumentale, liberté d'inspiration -avec un net penchant pour le jazz.
Images and words a aujourd'hui dix ans, et son empreinte sur la scène
métal est incontestable : des dizaines de groupes l'ont pris pour référence
et s'en s'ont réclamé. La plupart d'entre eux se sont révélés être des
ersatz risibles du combo new-yorkais. Mais d'autres ont su transcender
leur modèle et imposer un style authentiquement personnel (Angra, Vanden
Plas, Symphony X, Ark...). Andromeda est de ceux-là.
Le premier album
de ce groupe suédois mené par le guitariste Johan Reinholdz, compositeur
de la quasi-totalité des morceaux, associe l'essentiel des qualités d'Images
and Words. Extension of the wish est tour à tour effroyablement technique,
atmosphérique et expérimental -les sons étranges, les tonalités jazzy
et les délires de construction rappellent parfois Frank Zappa. Plus important,
les longs riffs alambiqués et sinueux de Reinholdz construisent des mélodies
qui impriment durablement la mémoire. Pour autant, la grande hétérogénéité
du tout, et une certaine tendance à tomber sporadiquement dans les travers
du genre -soli complaisants, froids et ridicules...- ne font pas d'Extension
of the wish un classique. Andromeda s'impose toutefois instantanément
comme un groupe à suivre avec attention.
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